Textes
et photos © journal LA PRESSE DE LA MANCHE 3 août 2014
J'AI TESTÉ POUR VOUS
J'ai
visité les grottes de Jobourg
Mercredi
dernier, j'ai descendu 128 mètres de falaises pour découvrir les
grottes de Jobourg, au cours d'une des sorties quotidiennes
proposées
par l'association « A la découverte de la Hague ». Récit.
J'ai le
vertige, et mes seules
activités sportives consistent à en regarder à la télévision. Voila
sans doute pourquoi je ne faisais pas le fier en arrivant à
la
buvette de la Falaise, à proximité du Nez de Jobourg. Nous sommes une
trentaine, en ce début d'après-midi, à participer à
cette sortie
proposée par l'association « A la découverte de la Hague ». Je troque
mes petites baskets à semelles lisses contre une bonne paire de
chaussures
de randonnée. Nous devons aussi enfiler des ceintures
équipées d'un
mousqueton autour de notre taille. J'en déduis que la route vers les
grottes sera tout sauf plate: il faudra descendre les 128
mètres de
falaise pour les atteindre, et « on
n'a pas adopté la méthode de vous balancer tous en vrac au
pied
», plaisante Yves Cottebrune, fondateur de l'association. Lui, Marie,
Jean-Marie et Wahid sont chargés de nous guider et de nous
ramener « sains et saufs » et « fatigués,
certes, mais ce n'est pas puni par la loi ».
C'est
parti pour cinq heures de visite !
Les
grottes, «
ça se mérite » !
Il faut être arrivés aux grottes
pendant la marée
basse,
c'est pourquoi nous partons trois heures en avance. Le début est
tranquille, nous nous arrêtons pour observer les îles
anglo-normandes
et le phare de Goury. Puis le sentier se resserre, et
nous
quittons le GR, le chemin de grande randonnée, pour emprunter un
passage étroit dont l'accès est interdit au public non
accompagné. C'est « la descente des Ratournettes, avec des
changements de direction en permanence ».
Je suis encore à l'aise, mais plus pour très longtemps. Un endroit nous
oblige à descendre à reculons, mains sur la corde. D'autres
cordes
sont disposées le reste de la descente, qui sera très chaotique pour
moi. Heureusement, nos guides du jour sont attentionnés et
m'aident
tour à tour. J'arrive dans les rochers, où nous sommes plusieurs à
nous reposer en attendant le reste du groupe. Le soleil vient donner à
la mer de superbes reflets, mais il cogne fort. En plus,
comme un
bleu, j'ai oublié de prendre une bouteille d'eau. heureusement, un de
mes compagnons de route avait prévu le coup et m'en donne
gentiment
une. Car pour arriver aux grottes, il reste encore du chemin:
« Ça
se mérite ! »,
assure
Yves.
En
rose, on peut m'apercevoir en train de descendre « à mon rythme ».
Nous crapahutons entre les cailloux, jusqu'à une deuxième
difficulté que certains auront renommé « le
passage Tarzan »: il
faut s'encorder pour franchir un passage où la mer n'est pas encore
redescendue. C'est le moment où je me suis demandé ce que je faisais
là. « La main ici, le pied droit là »: finalement, grâce aux conseils de
Wahid, le passage se fait sans encombre.
Dans
les passages compliqués, les accompagnateurs sont toujours là pour
donner un coup de main.
Le
lion et la Grande Église
Nous touchons au but: les grottes. La
grotte de la Grande Église dans un premier temps. Puis ma préférée:
celle du Lion, qui tire son nom du rocher situé en face, où on
peut distinguer - avec un peu d'imagination - le roi des animaux. À
l'intérieur, on s'installe pour écouter Yves nous conter les légendes
de cet endroit prisé autrefois des contrebandiers. Dans le fond
de la grotte, notre guide nous montre la beauté des parois, où le
lichen scintille avec les goutelettes d'eau. On en oublierait presque
que la mer remonte, et qu'il faut rentrer. Je propose à Jean-Marie
qu'un bateau vienne nous chercher, mais non: il faut emprunter le même
chemin. Le retour se fait sans trop de problème, la remontée de la
falaise me semble nettement plus facile. Motivé par la perspective de
manger une crêpe et de boire un coup à la buvette, je m'autorise même
une petite course avec un de mes équipiers du jour dans la monté
finale. La visite aura duré cinq heures. C'est fatigué et plutôt fier
que j'en termine, avec le sentiment d'avoir vu un endroit que peu de
gens auront l'occasion de découvrir.
Au fond de la grotte du Lion, Yves
Cottebrune fait observer le lichen sur les parois.
Pratique:
Visites
tous les jours jusqu'à fin septembre, horaires en fonction des marées.
5 € / adulte et 2,50 € pour les enfants de 10 à 16 ans. Réservations
au 02 33 53 86 12 ou 06 12 42 86 97.
Paul
LESIGNE
Textes
et photos © journal OUEST-FRANCE 16/17 août 2014
Grottes de Jobourg :
le trésor après l'effort
Sous les
falaises de Jobourg
(Manche) se cache un fabuleux trésor: des grottes accessibles à marée
basse.
Mais pour
y arriver, il faut
s'accrocher !
Reportage
«
Au pied de la falaise, nous arriverons dans un chaos infernal de
rochers ». Yves Cottebrune annonce la couleur avant de partir
pour cinq heures de balade. Le président de l'association « A la
découverte de la Hague » organise la descente vers les grottes de
Jobourg depuis 1993.
Un parcours ardu qui ne date pas d'aujourd'hui: « Le Touring-Club de France avait créé la
descente en 1907. Elle a été interdite dans les années 60 à la suite de
plusieurs accidents. Mais depuis que l'on encadre les sorties, il n'y
en a plus. »
Cela n'empêche pas les
guides de se montrer prudents. Chaussures de randonnées et ceintures
avec mousquetons obligatoires pour tous. Les cinq bénévoles et les 34
promeneurs inscrits entament la descente face à un panorama à couper le
souffle. Les vagues se cassent sur les rochers de granit en contrebas.
En face, le Nez de de Jobourg, qui abrite une réserve ornithologique,
change de couleur entre soleil et nuages. « C'est magnifique », s'émerveille
Pascal, venu de Mondeville (Calvados) avec sa femme Maud. L'occasion
pour lui de redécouvrir ses racines: « Mes parents sont originaires de
Beaumont-Hague. Mais j'ai très peu connu la région. »
Face
au Nez de
Jobourg, Yves donne ses instructions avant la descente des Ratournettes.
Passer le Verrou
Il ne faut pas oublier de regarder où
l'on met les
pieds. C'est le moment d'attaquer la descente des Ratournettes. Très
vite, ça se corse. Les mousquetons sont mis à contribution pour une
petite descente en rappel. Suit un sentier étroit en pente. « Tenez bien la corde orange »,
prévient Wahid, l'un des guides.
Arrivés en bas, Pascal témoigne que « la descente est faisable. Il y a des
guides partout. C'est bien sécurisé ». À chacun son rythme. « On aime bien les gens qui ont peur, assure
Yves. À la fin, ils sont contents car ils se sont
surpassés ». La pause
déjeuner face à la mer est bien méritée.
Mais il faut se remettre en route. « Je vais installer Tarzan », lance
Wahid. Un nom de code pour désigner la liane qui permet de passer le
Verrou, le passage qui ouvre l'accès aux grottes. C'est l'endroit le
plus ardu du parcours. Wahid attache le mousqueton et explique où poser
ses mains. Jean-Marie réceptionne de l'autre côté.
Le Verrou est
le passage le plus délicat.
Wahid guide les mains et les
pieds sur la paroi. Jean-Marie assure la réception.
« J'ai eu peur de tomber. Ce n'est pas
marrant », lance Éloïse. « Mais on a géré », affirme Nine. Les deux adolescentes sont
accompagnées par leurs mamans qui veillent au grain. « Dans leur emportement, elles ont tôt fait
de glisser », prévient Laurence, la mère de Nine. Les algues
rendent les rochers très glissants à l'approche des grottes.
Une cathédrale granitique
Mais ça y est, l'objectif est atteint. Certains se
faufilent dans la première grotte, le Tou aux Fées, après avoir pris
soin d'enlever leurs sacs à dos. La grotte suivante est plus
impressionnante. Entrer dans « la Grande Église », c'est découvrir une
cathédrale granitique sous la falaise. Les laminaires au sol rappellent
que la grotte se remplit à marée haute.
« Avant, la Grande Église
correspondait avec la Grotte du Lion »,
rappelle Jean-Marie.
Pour rejoindre cette dernière, il faut passer par
l'extérieur. Une fois dans l'obscurité, tout le monde s'assoit autour
d'Yves. Les parois sont humides. « Aujourd'hui, la mer est entrée car c'est
un gros coefficient. Mais elle n'entre pas souvent. Le lieu était
intéressant pour les contrebandiers. »
Le guide rapelle l'histoire des lieux: « Sous Louis XIV, il était interdit
d'importer, surtout d'Angleterre. Or, nous sommes en face des îles
anglo-normandes. Le débarquement de marchandises se faisait
généralement par une nuit sans lune, avec du brouillard. »
Mais le vrai trésor de la Grotte du
Lion n'a rien à voir avec ce traffic. En rampant dans une ouverture, on
accède à un autre endroit obscur... Jusqu'au moment où Yves éclaire le
plafond avec sa lampe torche. Les parois brillent. De l'or ? Non, du
lichen. « Le faible filet de lumière
qui entre ici est idéal pour son developpement. »
Il ne faut
pas s'attarder face à cette merveille. La mer commence à remonter.
Après avoir passé le Verrou à sec, encore faut-il refaire le parcours
en sens inverse. Prêts pour l'escalade ?
Jusqu'à fin septembre,
tarifs: 5 € par adulte; 2,50 € pour les enfants de 10 à 16 ans.
Réservation obligatoire au 02 33 53 86 12 ou 06 12 42 86 97.
Mail: aladecouvertedelahague@gmail.com
Matthieu STRICOT
|